Un 24 février, au milieu de la nuit.
Ft  @Hael


Il fait nuit noir. C’est le moment parfait, le moment que tu attends… celui que tu préfères. Quand tu t’échappes du minuscule appartement où tu vis seul, depuis que tes deux parents sont morts, tu as presque l’air… heureux ? Soulagé, en tout cas, c’est un fait. Ton visage ne porte pas les traces habituels de ton aigreur et de ta colère. Tu es juste étrangement calme, et bon sang, toutes tes rides t’en remercient.

La nuit (où tous les chats sont gris parait-il), le silence est presque parfait, l’obscurité donne une dimension nouvelle aux murs et aux couloirs que tu connais par coeur. La nuit, Mørk, tu as l’impression d’être une autre personne et ça te soulage du poids qui grandit dans ton être ces derniers mois… non année en vérité. Et plus fou encore, tu… boites moins. Tu n’es pas aussi souple et vif qu’avant, mais tu ne claudiques pas comme tu l’as fais toute la journée au travail. C’est comme si tu avais moins mal… à moins juste que tu oublies jusqu’à ton infirmité.

En tout cas, tu te glisses comme tu le fais toujours dans la cour centrale, bien décidé à profité du silence et de la solitude pour réfléchir et te détendre. Et alors que tu longes un mur, silencieusement, une main glissant contre le béton froid et légèrement rugueux tu te figes. A tes oreilles sensibles, un son te parfait. Et pendant un instant, un très long instant, un frisson se déclenche du bas de ton dos et se propage sur tout ton coeur. Ce n’est pas qu’externe. Le mouvement te remue à l’intérieur, jusqu’à serrer ta gorge d’une boule chaude… de l’émotion ?

Tu ne parviens pas à comprendre ce qui te touche à ce point, mais tu ne peux juste pas reculer et ignorer ce que tu as entendu. Lentement, à pas de loup, tu suis la musique dans l’air plat de l’immeuble, comprenant peu à peu qu’il s’agit d’une voix. D’un chant. De… quelque chose que tu n’as jamais entendu avant. La boule grossit dans ta gorge alors que tu arrives dans le dos de celui qui ose ainsi troubler ton escapade nocturne et tu t’arrêtes pour le contempler, en retenant même jusqu’à ton souffle.

Tu restes là un moment, incapable de te faire voir ou de jouer les sales types habituels. Tu écoutes juste, comme conscient que tu ne devrais pas être là. Et c’est quand tu changes ton poids de jambes, faisant craquer un truc sous ta jambe saine, que tu comprends que tu viens de rompre le moment, sans être capable de parler pour autant.

Un 24 février, au milieu de la nuit.
Ft  @Hael

Tu ne sais même pas ce que tu ressens vraiment, mais ce n’est pas quelque chose que tu as l’habitude de sentir au fond de toi, et c’est peut-être ça qui te fait le plus bizarre. Tu n’es pas du genre émotif. Tu n’as jamais appris à les exprimer et du coup tu as fini par mettre ça de côté. Il est plus simplement de s’en passer que d’exploser à force d’en ressentir sans pouvoir vider la sous-pape de pression.

Et du coup, ouais, tes yeux sont posés sur les cheveux aussi blancs que la neige que l’on voit parfois dehors. Il a l’air tout de pureté et de douceur, là tu sembles êtes directement un enfant des ombres. Le contraste te fait serrer les dents, alors que le bruit retourne le chanteur vers toi. Il s’arrête aussi sec, le son meurt sans avoir finit sa phrase et ça te serre le coeur. Tu aurais voulu entendre la fin ?

« J’en sais rien. Que tu réponds le plus simplement du monde, en regardant la silhouette qui s’est redressée et qui te dépasse en taille. T’aimes pas ça… Pas te faire du mal en tout cas… même si tu risques pas de faire grand mal avec ça. »

Du menton, tu lui désignes son cahier auquel il s’est accroché comme une arme. T’espères pour lui qui est conscient que si quelqu'un voulait lui chercher des noises, il ne servirait à rien à claquer du papier contre l’autre. A cette pensée, tes yeux roulent dans tes orbites, et tu finis par rouvrir la bouche en reculant d’un pas pour aller appuyer ton poids contre le mur le plus proche, afin de soulager ta jambe un peu. Rester debout sans bouger est toujours une torture.

« Je t’ai entendu chanter et je suis venu. Que tu finis par expliquer, en réfléchissant en même temps que tu parles. C’est la première fois que j’entendais… quelque chose comme ça. Que ça me donnait envie d’aller voir de plus près. »

On voit clairement sur ton visage que tu ne sais pas du tout comment analyser ton propre comportement. Tu es lent dans tes mots, tes sourcils froncés sur une expression perplexe. Quand tu finis par te rendre compte de cette “faiblesse” que tu montres à l’inconnu, tu ravales tout sous un masque de froid, de calme.

« Qu’est-ce que tu fiches ici en pleine nuit ? Et t’as des ennuis avec quelqu’un pour avoir si peur qu’on te fasse du mal ? Ca, tu veux le savoir. Si c’est le cas, tu sais que tu interviendras pour l’aider, ,parce que c’est dans tes fibres. »